EDITORIAL N°14 - JANVIER 2017
2016 s’éloigne avec son lot de drames et de décès de personnalités marquantes.
2017 naît à peine avec déjà une continuité de drames et de disparitions…
Alors que dans une lettre de voeux à mes amis et ma famille, je mettais l’accent sur la perte de notre humanité à travers une construction d’ « humanoïdes » de plus en plus consommateurs de biens matériels, de moins en moins fraternels, évoluant vers la destruction progressive de ce qui fait notre « humanité », quelques amis m’ont répondu par des notes positives : notant la résilience de l’humain à l’image de celle de la nature sous la neige ou bien de la superbe fleur de nénuphar croissant et s’épanouissant dans la vase !
Certes nous pouvons toujours voir le verre à moitié vide ou à moitié plein et nous « contenter » de « positiver »…
Que fera le monde de la transfusion pour renforcer cette chaine d’humanité en 2017 ?
Continuerons-nous à entretenir une production toujours croissante, pour répondre à une demande non raisonnée ? ou bien les « consommateurs » et les prescripteurs, choisiront-ils la « sobriété heureuse » ?
Les articles parus dans la revue Hématologie (1) concernant les attitudes d’épargne de ces précieux PSL, notamment en hématologie, seront-ils lus en 2017 plus que depuis 10 ans ?
Ou bien entretiendrons-nous une consommation irraisonnée comme celle des produits alimentaires ? Presserons-nous les donneurs de sang comme les « exploitants » ont épuisé les richesses terrestres en matière de végétaux consommables ?
Mais me direz-vous, l’homme trouve des solutions pour produire encore plus comme dans l’hydroponie (2) ou dans la production ex- vivo de concentrés de globules rouges (3) lorsque celle-ci sera au point ?
La transfusion saura-t-elle partager les richesses de l’ouest avec la sécheresse du sud ?
Bénévolat et solidarité se renforceront ils d’une réelle fraternité ?
Pour finir, je voudrais partager avec vous une réflexion née d’une discussion avec un collègue du Centre national de référence des groupes sanguins lors de la dernière réunion du réseau DREPANOCYTOSE à Paris.
Notre collègue nous a exposé la très grande complexité de la transfusion des personnes atteintes de cette maladie et originaires d’Afrique, le remarquable travail de leur laboratoire et l’impressionnante organisation de la banque de sang rare de Créteil. Cependant, nous nous sommes tout de même posé la question de l’absence de coopération internationale dans ce domaine.
Réalisez-vous que des concentrés de globules rouges de groupes sanguins rares sont prélevés à l’autre bout de la planète, voyagent dans un sens pour être congelés et stockés à Créteil puis repartent afin de répondre à la demande de patients issus de même groupe ethnique en Afrique ou aux Antilles !!
Réalisez-vous que le sang issu de personnes de groupes sanguins hyper rares ne peut être prélevé en France sous prétexte que ces personnes ont séjourné dans un pays comme la Guyane alors, qu’à ma connaissance, peu de parasites ou virus doivent résister à la congélation – décongélation et aux différents lavages des concentrés de globules rouges décongelés avant transfusion.
Ne pourrions-nous pas revoir l’application de nos mesures sécuritaires en France ? Et surtout aider nos collègues africains ou antillais à développer leur propre « banque de sang rare » ? Comme nous les aidons à organiser leur centre de traitement des sujets drépanocytaires.
A l’aube de cette nouvelle année, je souhaite ardemment que la transfusion sanguine s’engage dans une réflexion d’éthique et de fraternité, laissant le souci de la gestion comptable à d’autres domaines. A tous ces acteurs, je souhaite une très belle année 2017.
Dominique Jaulmes
1. Jaulmes D., Ceccaldi J., Colombat Ph. La transfusion dans les hémopathies en fin de vie : aspects éthiques et organisationnels. Hématologie, 2010 ; 16 : 1228-34
2. Valo M. Le laboratoire qui cultive les plantes sans sol ni soleil. Le Monde mardi 31 décembre 2016 dimanche 1er janvier 2017 lundi 2 janvier 2017, page 6
3. Mazurier C., Douay L. In vitro generation of blood red cells from stem cells: a sketch of the future. Biol Aujourdhui, 2016 ; 210(1) : 9-17.