EDITORIAL N°09 - JUIN 2015
Chers internautes,
Dans quelques jours, nous nous retrouverons au congrès à Montpellier pour partager nos projets transfusionnels avec leur lot d’enthousiasme et de préoccupations.
Nous sommes cette année partagés entre ce grand plaisir de nous retrouver dès la rentrée ou presque et l’ombre projetée par l’absence de notre collègue et ami, Jean Jacques LEFRERE.
C’est en pensant à son travail et tout particulièrement à sa passion pour les virus dès son entrée dans le monde transfusionnel, que je nous interroge une fois de plus sur les dangers de la transfusion et le besoin de mesurer l’indispensable bénéfice /risque. La très récente découverte d’une nouvelle forme de la protéine prion responsable d’une maladie neurodégérative identifiée par une atrophie multi systématisée (AMS) et responsable à ce jour du décès de 14 patients. Cette maladie n’est à priori transmissible que par injection intra cérébrale de matériel cérébral (étude chez le rat*).
Indépendamment de ces nouvelles découvertes, le nombre de maladies neurodégénératives galope avec plus d’un million de personne en France (OMS 2014) ! et nous ne connaissons toujours pas la pathogénie de ces maladies, ni le temps d’incubation chez l’homme. Alors peut-être devons-nous, non pas nous lancer dans une phobie non fondée, ni la mise au point d’une nouvelle technologie de dépistage, mais simplement respecter la prudence et continuer l’épargne des PSL ?
Cette épargne entre également dans le respect du donneur dont il sera question lors de plusieurs cessions au cours du congrès.
Hormis les séances très scientifiques et de réflexion éthique du congrès, la formation est toujours un souci primordial et nous sommes particulièrement invités à réfléchir sur l’apport de la simulation dans cette formation.
Une journée d’initiation sur ce sujet a bien introduit le débat, le 6 juin dernier à l INTS ; les vidéos seront disponibles très prochainement sur le site de l’Institut.
Deux types de formation par simulation se dégagent, avec des coûts et des enjeux bien différents.
La première insiste sur l’importance de la formation à la communication et au travail en équipe au cours de ces simulations. En effet, le cursus de formation des professionnels de santé favorise jusqu’ à présent le cloisonnement en privilégiant encore le colloque singulier et en ne valorisant pas la démarche participative. La simulation semble importante dans les situations à risque ou de dysfonctionnement, mettant en évidence le travail sur l’apprentissage par les erreurs ; quelles sont les qualités nécessaires à la compétence professionnelle ? Le savoir-faire certes mais aussi le savoir-être ; ainsi que le travail en équipe.
Une autre forme utilise du matériel de haute technologie et coûteux et se pose alors une question d’éthique sociétale. Il serait sans doute judicieux de n’accorder des crédits pour Matériel seulement sur projet construit autour d’un effectif de formateur. Il en est de même pour la question du choix des praticiens à former. En effet les praticiens qui pratiquent de très nombreuses transfusions au quotidien, pourraient bénéficier de cette formation par simulation sur mannequin et ensuite coacher ceux qui pratiquent beaucoup moins voire exceptionnellement comme dans les services de neurologie ou de psychiatrie. Ce dernier fait appel à l’esprit de compagnonnage et d’équipe. Est-il légitime de former un praticien s’il ne peut mettre en pratique ces acquis très régulièrement ?
Pouvons-nous compter sur ces modes de formation pour diminuer les EIG en transfusion, qui d’après les observations, ne présentent que peu d’évolution favorable entre 2005 et 2009 !
Quelles sont les causes des EIG : plus souvent liées au manque de communication et au manque de formation. Il serait intéressant de mettre en place des RMM simulées ; des chambre des erreurs, de développer les réflexes « sécurité » de simuler les mises en situation (jeux de rôle) toutes ces formations ne requièrent que du temps et de la bonne volonté mais aucun matériel.
Nous sommes invités à une réflexion sur l’efficacité de l’hémovigilance. Sa mise en place n’est pas suivie des changements de pratiques escomptés, ni de la diminution des EIG. Il est important de faire le point sur les effectifs, sur les réflexes sécuritaires, sur la culture du non jugement et l’importance du travail en équipe, autant de qualités humaines requises pour bien soigner.
Il sera également important d’évaluer ces formations par simulation. Comme dans tous les domaines, nous ne devons pas nous laisser entrainer par le marché très profitable que représente cette haute technologie.
Venez-donc nombreux à Montpellier, partager certitudes et craintes dans ces nouveaux domaines.
*Evidence for α-synuclein prions causing multiple system atrophy in humans with parkinsonism.Prusiner SB, Woerman AL, Mordes DA, Watts JC, Rampersaud R, Berry DB, Patel S, Oehler A, Lowe JK, Kravitz SN, Geschwind DH, Glidden DV, Halliday GM, Middleton LT, Gentleman SM, Grinberg LT, Giles K. Proc Natl Acad Sci U S A. 2015 Aug 31. pii: 201514475